27e Festival International de Films de Femmes de Créteil "Différence(s)" HOMMAGE A MARIA KLONARIS & KATERINA THOMADAKI Projection suivie d'une table ronde/rencontre avec les artistes et Jackie Buet, directrice du Festival, Eric Le Roy, Archives Françaises du Film/CNC, Françoise Ducros, historienne l'art, Inspecteur à la création artistique Délégation aux Arts Plastiques et Christian Gattinoni, critique d'art, rédacteur en chef d'exporevue.org. Renseignements : Tél. 01 49 80 38 98 - http://www.filmsdefemmes.com Cinéastes, photographes, installationistes, vidéastes,
théoriciennes, l'oeuvre de Maria Klonaris et Katerina
Thomadaki est multi-forme. Cette année le Festival International
de Films de Femmes de Créteil rend hommage à leur
"Cinéma corporel" en présentant les remarquables
restaurations en 35mm par les Archives Françaises du Film/CNC
de deux "films cultes" de leur "Série Portraits"
réalisés au début des années 80 :
"Selva" de Maria Klonaris (70min, avec Parvaneh Navaï)
et "Chutes. Désert.Syn" de Katerina Thomadaki
(16min, avec Syn Guérin) - chorégraphies extatiques
du corps dans la forêt ou le désert, amplifiées
par la musicalité du geste de la caméra. Ces restaurations
de films ciné-plastiques constituent une opération
pilote pour les Archives Françaises du Film/CNC. MARIA KLONARIS / KATERINA THOMADAKI Maria Klonaris et Katerina Thomadaki, deux figures incontournables
de l'avant-garde du cinéma de création seront les
invitées d'honneur de notre festival 2005. Pionnières indéniables, elles ont exploré des manières différentes de détourner et mixer les supports et les médias, qu'elles maîtrisent et réinventent depuis les années 70. Grâce à leur talent singulier, internationalement reconnu, nous souhaitons amener le public de notre festival à aborder dans les meilleures conditions l'accès à des uvres cinématographiques de création. Ouvrir les regards et éduquer le jeune public à ce « cinéma corporel » désormais partie intégrante de l'histoire « des cinémas », telle est notre mission. Maria Klonaris et Katerina Thomadaki y contribuent généreusement. Nous sommes fières de pouvoir les honorer pour leur uvre à travers deux programmes et une table ronde qui leur sera consacrée. Jackie Buet A PROPOS DE LA RESTAURATION DES FILMS L'oeuvre de Maria Klonaris et Katerina Thomadaki fait partie du patrimoine cinématographique par son originalité, son caractère novateur et précurseur et son importance dans l'histoire du cinéma expérimental. C'est avec la volonté de sauvegarder cette uvre pionnière que les deux films, Selva et Chutes. Désert. Syn, ont été retenus dans les priorités présentées à la Commission du Patrimoine cinématographique dans le cadre du programme de sauvegarde de films lancé par le Ministère de la Culture et confié aux Archives Françaises du Film en 1990. Ce programme a permis de sauver plus de 10.000 films des collections patrimoniales constituées de longs et courts métrages de fiction, documentaires, actualités, films d'animation etc La majeure partie de ces films sont antérieurs à 1955 et ont été tournés sur support nitrate : leur restauration souvent coûteuse a permis leur conservation à long terme et la mise à disposition de ces oeuvres auprès du public. Dans le cadre de ce programme, quelques films plus récents, notamment d'auteurs des années 70 et 80, ont fait l'objet d'une attention particulière en raison de leur importance patrimoniale et de l'état critique dans lequel se trouvait le matériel original. Les Archives Françaises du Film ont procédé à une sévère sélection qualitative de ces uvres contemporaines en raison du coût élevé des travaux de restauration. La restauration de Selva en 35mm est le premier gonflage en 35mm d'un long métrage non narratif en Super 8 entrepris par les Archives Françaises du Film. Le court métrage Chutes.Désert.Syn. a ensuite été restauré avec la même filière. Les travaux ont été réalisés sous la direction de Maria Klonaris et Katerina Thomadaki. Ce travail extrêmement rigoureux a été possible grâce à la polyvalence des deux artistes (cinéastes, plasticiennes, vidéastes) associée à une compétence, une précision et un sérieux remarquables. Ces restaurations sont uniques et exemplaires pour notre institution en ce sens que ces deux films par leur forme même ont nécessité une filière de restauration non traditionnelle, employant des techniques très pointues, ne correspondant pas aux critères habituels en vigueur dans les archives. Ce travail exceptionnel n'a aucun équivalent dans le monde des archives membres de la F.I.A.F. (Fédération Internationale des Archives de Films) et fait désormais l'admiration de nombreuses archives et cinémathèques étrangères. Eric Le Roy
FILMS DE LA "SERIE PORTRAITS" MARIA KLONARIS Original en Super 8 couleurs, 70 min, sonore, 1981-83 © Klonaris/Thomadaki KATERINA THOMADAKI Original en Super 8 couleurs, 18min, silencieux, 1983-85
Katerina Thomadaki, "Chutes. Désert. Syn" © Klonaris/Thomadaki VIDEOS DU "CYCLE DE L'ANGE" : "REQUIEM POUR LE XXE SIECLE" Vidéo, 14min., N&B et couleur, sonore, 1994 Maria Klonaris/Katerina Thomadaki, Requiem pour le XXe siècle. © Klonaris/Thomadaki "PERSONAL STATEMENT" Vidéo, 7min., N&B et couleur, sonore, 1994
"PULSAR" (Pulsar : abréviation du terme astronomique Pulsating Star) 2001, vidéo numérique, couleurs, sonore, 14min.
"QUASAR" (Quasar : abréviation du terme astronomique Quasi Stellar Radiosource) 2002/2003, vidéo numérique couleurs et N &
B, 30min. Le Cinéma corporel de Maria Klonaris et Katerina Thomadaki Maria Klonaris et Katerina Thomadaki sont les conceptrices,
les créatrices, les théoriciennes du Cinéma
corporel. Apparu en 1976 avec la réalisation de leur film
Double Labyrinthe, discuté dès les premières
projections, explicité et poétisé dans leurs
manifestes, développé dans de nombreux textes publiés
depuis, le Cinéma corporel est le fondement de leur art
et une proposition éblouissante, totalement inédite,
dansl'histoire contemporaine du cinéma et des arts visuels. Dans leur parcours, le Cinéma corporel désigne
la pratique cinématographique mise en place au tournant
biographique de leur arrivée d'Athènes à
Paris en 1975. Si l'on se tient au support filmique, le Cinéma
corporel correspond aux séries successives et entrecroisées
de La Axé sur la question de la figuration du corps féminin,
le Cinéma corporel est aussi une pratique (auto-)biographique
qui voit les cinéastes mettre-en-scène leur identité
pour questionner le concept-même d'identité. Elles
créent des tableaux filmiques où entre en jeu une
symbolique complexe du moi. Corrélativement, leurs autoportraits
et portraits ritualisés bousculent le langage cinématographique
et soulèvent des questions essentielles : comment représenter
le corps féminin «en dehors des codes narratifs
et des images normées de la féminité»?
Qu'advient-il de l'image lorsqu'elle est confrontée à
la réalité du sujet ? Comment favoriser de nouveaux
types de lecture de l'image projetée non narrative ? C'est
ainsi que le Cinéma corporel de Maria Klonaris et Katerina
Thomadaki mobilise toute une réflexion éthique
et politique sur l'image en général et sur le médium
cinématographique en particulier. Ce qu'il met en avant,
c'est un double mouvement de perturbation et de création
du cinéma par le corps. L'image réinvente le corps
et le corps réinvente Dans les contextes où elles s'inscrivent, la réflexion et la pratique de Maria Klonaris et Katerina Thomadaki bousculent délibérement les conventions, les représentations établies, les concepts admis. Croisant les technicités, faisant appel à de multiples champs de connaissance, reliant la mythologie aux problématiques contemporaines, unissant des antagonismes, transgressant des tabous et portant les idées ailleurs, elles créent une oeuvre unique, inclassable et véritablement pionnière. Car ce qui est remarquable, c'est que cette démarche qui traverse les disciplines et les médias depuis trois décennies a précédé des évolutions essentielles de notre époque, tant du point de vue des concepts investigués (le féminin, l'intersexualité, l'»ange», la transversalité, letransculturalisme, les intersections art-sciences), que du point de vue de la pratique technologique (l'éclatement des conventions et le croisement des langages). Les deux artistes ont ainsi porté le cinéma sur un autre territoire : au-delà des binarités et des rigidités de la pensée moderniste, qui privilégie les catégories et les terrains spécifiques, elles ont institué l'hybridation des formes et des concepts, proposé la fluidité, les dialectiques mouvantes et complexes et mis en place, avec beaucoup d'avance, les principes d'une pensée «post-moderne» préférant les fusions et les mutations aux encadrements statiques. En tous points, Maria Klonaris et Katerina Thomadaki ont anticipé des mouvements majeurs de l'art et de la culture contemporaine, et ont par là-même contribué à sa formation et à sa compréhension. Cécile Chich |