Musée des Beaux-Arts

 

 

Les Dieux comme les Hommes
Gravures rhénanes du XVIe siècle

Un choix de Jean Louis Schefer dans les collections du Cabinet des Estampes et des Dessins de Strasbourg


Sebald Beham, Adam et Eve chassés du Paradis, 1543

 

 

La présente exposition participe du désir de révéler les trésors scellés du Cabinet des Estampes et des Dessins de Strasbourg. L'opportunité de mettre au jour Les Riches heures de ce lieu devenu confidentiel, s'est offerte lorsque les Musées de Strasbourg ont proposé à l'écrivain, essayiste et philosophe Jean Louis Schefer de venir explorer ce creuset et lui ont donné carte blanche pour y sélectionner un ensemble de gravures.

Ce choix sera présenté au Palais Rohan, dans une salle du Musée des Beaux-Arts.

Partant des seules uvres, et sans a priori, Jean Louis Schefer a réuni plus de 100 estampes et 1 dessin, pièces exceptionnelles souvent inédites, émanant pour la plupart d'artistes germaniques qui avaient trouvé leur voie grâce à Dürer, ou en dehors de lui.

D'emblée, en effet, les maîtres attendus tels Dürer, Cranach et Baldung Grien ont été écartés, pour laisser la parole aux graveurs, sinon inconnus du moins fort méconnus du public. Tous, cependant, présentent la caractéristique d'avoir su capter, principalement grâce aux uvres de Dürer, les apports innovants de la Renaissance italienne. Ainsi Albrecht Altdorfer, Heinrich Aldegrever, Lucas de Leyde, viennent côtoyer les frères Barthel et Sebald Beham, Georg Pencz, dits "les petits maîtres", en raison de leur prédilection pour le format réduit de leurs gravures,
ou encore Virgil Solis, Augustin Hirschvogel, Jacob Binck, Martin Treu.
Ils jouent précisément un rôle de premier plan dans l'élaboration d'un style spécifiquement germanique qui, délaissant l'écriture du gothique flamboyant, va peu à peu adopter les lignes et les formes plastiques de la fin du Quattrocento italien.

Aussi une sélection des protagonistes essentiels de la Renaissance italienne a-t-elle été placée en regard des artistes germaniques. Le Cabinet des Estampes et des Dessins conserve en effet au sein du fonds de gravures italiennes, les exemplaires les plus significatifs, et les plus anciens, notamment le Combat d'hommes nus de Pollaiuolo, le Combat des dieux marins et la Bacchanale au Silène de Mantegna, dont la nouveauté capitale n'avait pas échappé à Dürer.

L'idée, par ailleurs, de présenter Delaune conjointement aux frères Beham, à Pencz et aux Italiens, a permis de souligner l'importance fondamentale de la gravure dans la diffusion des images et des schèmes de composition ; et ceci dès leur création. En outre, elle met en lumière l'un des aspects les plus novateurs alors de l'estampe, celui de se constituer son champ d'expression propre en dehors de toute référence au dessin et à la peinture.

L'intitulé de cette exposition ("Les Dieux comme les Hommes") fait la moyenne des thèmes traités par les artistes : non seulement les dieux et les hommes sont confondus, les scènes réalistes, bibliques et mytho -logiques traitées avec une même vivacité témoignant d'un usage extrêmement libre des "modèles" (Mantegna, Jules Romain, Michel-Ange), mais un frisson de mouvement, de sensualité, un frémissement de peau animent toutes les scènes, depuis l'expulsion du Paradis terrestre qui semble ici l'ouverture jubilatoire de l'histoire humaine ou de sa comédie.

Commissaires Jean Louis Schefer et Anny-Claire Haus
Conservateur du Cabinet des Estampes et des Dessins de Strasbourg