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Yannis Haïnis, peintre, sculpteur et citoyen



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Yannis Haïnis 3,35x2,25 m, sur papier, 1970

 

Commencée il y a plus d’un demi-siècle, l’œuvre plastique de Yannis Haïnis, né en 1930, est intimement liée à son action politique et éducative, et toujours pensée en relation intrinsèque avec l’homme et la société.

Pendant l'occupation allemande, à Athènes, il est intitié à l'art par son maître, le peintre originaire de Smyrne Nikos Kartsonakis-Nakis. Avec le peintre Moralis, sous la direction duquel il a étudié après la guerre, avant de suivre des cours aux Beaux-arts de Paris, à la Grande Chaumière et dans l’atelier d’André Lhote, il a en commun le goût pour une représentation de la figure humaine aux formes schématiques, grands aplats qui ne sont pas sans évoquer les collages de Matisse, mais qui rappellent également certaines figures pariétales, comme ces silhouettes millénaires gravées sur les parois de roches, dans le désert saharien. Les chasseurs du Paléolithique et les pasteurs du Néolithique deviennent ici guerriers, révolutionnaires à la main levée, tenant fusils et drapeaux rougeoyants, tandis que les visages s’élèvent vers le ciel comme un cri, dans un pays dévasté par la guerre civile et où les dictatures se succèdent.

Parallèlement à ces tableaux où la figure humaine et les lignes courbes prédominent, traversées par une énergie première, Yannis Haïnis développe une œuvre caractérisée par l’abstraction géométrique, à plat ou en volume, plans tracés dans l’espace, où l’on perçoit une affinité avec l’esprit du Bauhaus. Monde de signes, qui semblent s’inspirer des réseaux électriques, des tuyaux hydrauliques, des plans d’immeubles et de villes. Formes, couleurs, chiffres et lettres se partagent une signalétique du monde. Les œuvres, toujours de très grandes dimensions, pourraient s’inscrire dans la trame urbaine comme un miroir interne, selon le désir de l’artiste et sa vision de l’art, qui devrait selon lui être intégré à la cité, devenir le bien commun de tous les citoyens, plutôt qu’un objet marchand enfermé dans le réseau des galeries.

Cette conception d’un art que les citoyens devraient avoir la possibilité de s’approprier, Yannis Haïnis l’a également nourrie par sa pratique culturelle et éducative, ainsi que par son travail théorique. Yannis Haïnis a créé en 1954 la revue d’art Επιθεώρηση Τέχνης à laquelle de nombreux artistes et théoriciens ont contribué, essayant de combler le vide culturel dû à la  situation fragile d’un pays ravagé par la guerre et la guerre civile, où un grand nombre d’intellectuels et d’artistes se trouvaient en prison ou en exil. Essayant de se démarquer de la ligne politique et culturelle du Parti Communiste, refusant le réalisme socialiste tout comme la marchandisation de l’art dans un  monde soumis à l’idéologie capitaliste, la revue a été publiée jusqu’en 1967, date du coup d’état de la junte des colonels. Yannis Haïnis a continué son action politique à Paris avec le Front des Artistes Plasticiens aux côtés de  Jean Clair, Ben, Morellet, Boltanski, Viallat, Reynaud, Fromanger, et La Vigne.

Dans son désir d’éducation esthétique des citoyens grecs, Yannis Haïnis, parallèlement à la création d’une revue, avait également constitué en 1961 un groupe d’artistes et de théoriciens, nommé "groupe d’art α" (ομάδα τέχνης α), avec des artistes soucieux de l’éducation artistique de  leurs concitoyens, tels K. Klouvatos, D. Kokkinidis, Kosmas Xenakis, Eleni Vernadaki, Nestoras Papanikolopoulos, Sarafianos, G. Maltezos, E. Freris, V. Dimitreas et Clio Bostantzoglou-Tripou, groupe auquel ont participé par la suite d’autres artistes, tels Vasso Katraki, P. Tsetis, Y. Psychopedis, etc. Le groupe organisait dans les banlieues des grandes villes et en province, dans des lieux où le public n’avait pas d’accès à la culture, des expositions accompagnées de séries de conférences sur l’histoire de l’art, ainsi que sur la pratique de l’art, sur les couleurs, les formes et les techniques. Ouvriers et paysans, le plus souvent illettrés, étaient invités à suivre les cours et à débattre longuement avec les artistes et les théoriciens. Les actions du "groupe d’art α" ainsi ont joué un rôle pionnier pour la diffusion de la culture auprès d'une population de milieux modestes, vivant à l'écart de la capitale où les activités culturelles étaient surtout concentrées à l'époque.

C’est cette œuvre développée en marge des réseaux commerciaux de l’art et dans un  souci permanent d’engagement, que le Centre Culturel de Nea Ionia, à Volos, présente exceptionnellement du 15 juin au 29 juillet 2013, à l’occasion d’une exposition rétrospective, organisée par Fondation Porphyrogenis. Commissaire de l'exposition : Vassia Karabellia.

Anguéliki Garidis



© Yannis Haïnis 2,40x1,60 m, sur bois, 1988




© Yannis Haïnis 1970-73




© Yannis Haïnis 1,85x1,50 m, acrylique, 1970





© Yannis Haïnis 2,10x1,55 m, bois, 1970


© Yannis Haïnis 2,56x1,82 m 1981




© Yannis Haïnis 1,02x0,73 m, feutre sur papier, 1960




© Yannis Haïnis 3,64x2,54 m, composition, acrylique, 2002




© Yannis Haïnis 2,53x2,02 m, composition, acrylique, 2005




© Yannis Haïnis 2,28x3,42 m, composition, acrylique, 2008




© Yannis Haïnis 3,00x1,90 m, composition, acrylique, 2003




© Yannis Haïnis 4,40x2,06 m, composition, acrylique, 2007




© Yannis Haïnis 4,00x2,20 m, contre-plaqué, acrylique, 1999




© Yannis Haïnis 2,20x2,20 m, composition, bois, huile, 1995




© Yannis Haïnis




© Yannis Haïnis




© Yannis Haïnis