Evgenija Demnievska Signer le vide -
projet d'art participatif
Evgenija Demnievska 2016
« Signer le vide ». Avec ce titre
énigmatique, Evgenija Demnievska, artiste multimédia
installée à Paris et active, grâce à ses installations
participatives, à travers toute l’Europe et au-delà,
incite le visiteur à réfléchir à ce que signifie l’art
aujourd’hui, tout en l’invitant à participer, de
manière ludique, à son action.
Peintre formée en Ex
Yougoslavie puis au Japon, où elle a étudié la
peinture traditionnelle pendant plusieurs années,
Evgenija Demnievska a très vite élargi son champ
d’action, en présentant des expositions «
ambientales », où le public participait à l’œuvre,
la réinventant à travers ses multiples segments. Par
la suite, elle a développé son art en réalisant des
performances en réseau, se déroulant simultanément
dans des villes et des pays différents,
l’information étant relayée par téléfax d’abord,
puis grâce à l’Internet, intégrant à ses actions la
photographie et la vidéo ; ainsi que l’animation
numérique… A Dourdan, loin de ses installations
internationales à grande échelle, c’est un projet
minimaliste que l’artiste propose :
Evgenija
Demnievska
2016
Choisir une pistache,
la manger, puis inscrire ses initiales sur la
coquille vide. Si l’une des moitiés demeure comme
trace de sa participation au projet, l’autre est
offerte au visiteur, accompagnée d’une coquille
signée par l’auteur. Il est donc possible pour le
visiteur d’acquérir une œuvre d’art, pour laquelle
il aura été un participant actif, contribuant à
cette création.
Evgenija
Demnievska
2016
« Signer le vide ».
Deux termes antinomiques sont mis face à face, comme
les deux morceaux d’une coque de pistache. Le vide
évoque immédiatement son contraire, le plein,
notions primordiales dans les philosophies
asiatiques dont Evgenija a été imprégnée durant ses
études à Tokyo. Vide et plein s’interpénètrent, ne
peuvent exister l’un sans l’autre, tout comme le yin
et le yang. Le vide n’est considéré comme tel que
par rapport au plein. Selon la pensée chinoise, le
souffle de la création jaillit du vide. Ici, c’est
le plein qui s’est transformé en vide, la coquille
contenant en creux la trace de ce qui a été, et qui
s’est transformé, assimilé par le visiteur. En mangeant la pistache
et en signant la coque vide, le spectateur devient
acteur, partie intégrante de l’œuvre, qui n’est pas
seulement la chose créée, mais aussi, surtout ici,
l’acte créateur, le souffle de l’imagination,
l’énergie qui pousse à inventer.
Mais comment signer une idée ? L’artiste et
le visiteur deviennent cosignataires de ce vide, qui
pourtant n’est pas néant et s’inscrit dans une
filiation artistique. Art éphémère, ludique et
philosophique à la fois, auquel le spectateur est
invité à contribuer en jouant, tout en ayant
conscience de la portée conceptuelle du projet.
Ne pourrait-on pas
glisser ici, également, un questionnement sur
l’œuvre d’art, devenue objet de consommation parmi
d’autres ? Mais au contraire de l’objet d’art, objet
marchand, qui n’existe pas sans le regard du
spectateur-acheteur, l’art de la communication,
faisant participer le visiteur en le rendant partie
prenante de l’œuvre et sans lequel elle ne pourrait
se déployer, est au centre du travail artistique
d’Evgenija Demnievska, pour qui le lien est
primordial.