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Danielle Dénouette
« Traces d’éternité »
Générosité
d’une œuvre disséminée à travers les continents, pollen nourricier qui
engendre d’autres œuvres, créées par d’autres artistes. Art
postal développé sous le signe de l’Ange messager et dont l’échange est
le moteur. Œuvre
légère comme une feuille qui tombe, illuminée par un soleil d’automne,
comme une fleur de cerisier balancée par la brise, où la nature
s’imprègne des saisons du désir.
Boîtes
à secrets où l’éphémère côtoie le minuscule, temples portatifs où des
traces du religieux, petits anges chrétiens ou bouddhas au sourire
impassible, s’allient aux fruits du hasard, glanés dans la nature ou le
quotidien, collages imprégnés de douceur, emprunts rêveurs insérés dans
l’écrin d’une écriture qui joue avec l’espace, accompagne discrètement
les objets dans leurs voyages. Nervures de feuilles, labyrinthe
d’entrelacs agencés comme un langage, écriture céleste.
Univers
minuscules, qui pourraient évoquer l’esprit des jardins chinois et
japonais, mais dans une composition uniquement dirigée par la logique
des songes, celle d’une poésie fragmentée, où l’éphémère et le fugace
s’allient au sens de l’éternité, où microcosme et macrocosme
s’interpénètrent, où la fragilité d’un brin d’herbe répond à
l’immensité sidérale, ainsi dans les rouleaux d’herbes, d’arbres et de
nuages - où les nuées, qui se détachent sur un bleu profond, minéral,
deviennent constellations, myriades d’étoiles.
Terre
et ciel se répondent et s’allient sur des supports toujours
différents : Livres
détournés, transformés : « Livre de l’ange », devenu
niche discrète pour un angelot, « Livre de l’arbre »,
« Livre de l’inachevé », où les pensées du philosophe
s’enroulent autour des empreintes de feuilles qui se déclinent comme
des traces fossiles d’un instant retenu. Tableaux cousus, fragments
recomposés en un tout, alliant le geste ancestral et l’expérimentation
toujours renouvelée.
Des
mondes imaginaires désertés par les hommes, émergent des reliefs nés du
hasard, griffures et taches abandonnées par d’autres œuvres, rognures,
chutes de papier délaissées devenues supports pour un univers évoqué
presque à l’infini : arbres solitaires, théories de graminées
balancées par le vent, montagnes nues sous l’orage des lacérations.
Fragments d’œuvres qui se suffisent à eux-mêmes et cependant sont
appelés à former un tout. Paysages qui se juxtaposent pour former une
autre œuvre, abstraction géométrique qui évolue, se reconstruit au gré
des dispositions.
Œuvre
inventée à partir des restes, feuilles d’arbres recueillies avec soin,
empreintes de plantes, chutes de papier, objets divers, récupération
imprégnée de tendresse, traces de vie invitées vers un nouveau destin.
Œuvre qui se cherche, se déconstruit pour toujours se reconstruire.
Anguéliki Garidis, 2008.