Bulletin de la galerie Sollertis N°47 Septembre - Octobre
1996
Alain Josseau
"Le géographe"
August 28 to October 9 / du 28 août au 9 octobre
Faisant suite à la présentation des "petits instruments
pour un observatoire" dans le cadre de l'exposition ARSLAB - les sens
du virtuel à Turin, "le géographe" est une sorte
d'exposé articulé en plusieurs séquences sur l'espace
et les espaces.
Alors que ces petits instruments pour un observatoire conjuguait les codes
de représentation de l'espace astronomique et scientifique, à
l'aide d'une collectiond'appareils techniques absurdes et poétiques
(suiveur de lune, plan de l'écliptique en variation corrigée...),
"le géographe" interroge les systèmes de représentation
de l'espace terrestre par l'intermédiaire de l'espace pictural et
de l'histoire de l'art.
Succédant à l'interrogation de Ptolémée "comment
se retrouver sur terre" ou, selon la traduction, "comment se représenter
la terre", I'installation sonde la représentation de l'espace
dans l'image. Par une suite de pièces où le regardeur est
acteur, I'installation fait résonner l'espace réel et l'espace
d'exposition. Chaque pièce génère le trouble en créant
des interfaces entre l'espace représenté picturalement et
l'espace du vécu, entre les codes et le réel, entre le cadre
et la réalité physiologique de la vision.
Dans la galerie, ces dispositifs créent des directions, des lignes
de fuite. Ils perturbent les distances, bouleversent la relation du visiteur
à l'espace en mobilisant toute les dimensions de l'appréhension
physiologique de celui-ci: marcher, s'orienter, voir, saisir l'espace en
termes d'événement et non de lieu...
La galerie devenant non plus, un pur contenant, mais aussi, lieu d'inscription,
de relevé, d'arpentage. . .
A.J.
Alain Josseau (cortesy galerie Sollertis)
Extrait du texte le désir de peindre, Claude Faure,
préface du catalogue de l'exposition.
Le paysage peint, pour évocateur, pour émouvant, pour évident
qu'il soit, ne peut suffire que
fugitivement à calmer notre appétit de réel. La meilleure
représentation se donne dans le même
mouvement comme échec à représenter. Le monde réel
reste à la fois proche et inaccessible,
tout entier visible et caché. Cela est vrai au premier chef pour
l'espace et pour la lumière. Les
développements de l'histoire de l'art n'ont pas effacé une
question aussi ancienne qu'elle.
A partir de ce sentiment, qui n'est nullement désespéré,
Josseau va conjuguer son amour des
appareils de vision et ses connaissances historiques pour intégrer
ses toiles dans des dispositifs qui
seront comme autant de tentatives d'exploration des vertus et des limites
de la représentation
picturale (et, dans une moindre mesure, de la représentation photographique).(...).
Ainsi que son auteur l'indique lui-même, le géogaraphe
est organisé comme "une sorte d'exposé
articulé en plusieurs séquences" dans lesquelles chaque
image (la plupart du temps des
peintures et aussi quelques photographies) est couplée avec un appareil
optique, en général
très simple. Le premier acte de l'artiste a été de
plonger la galerie dans l'oscurité, lui donnant
par là-même des allures qui rappellent une exposition scientifique
et avertissant le visiteur
bénévole, dès le seuil, qu'il ne s'agit pas d'un accrochage
de peintures au sens ordinaire.
Les appareils dont il est question ressemblent parfois à ceux dont
se servaient déjà depuis
plusieurs siècles les peintres paysagistes (mais qu'ils se gardaient
de montrer). La pièce nommée
topographie, par exemple, est formée de quatre éléments:
au mur un paysage trés éclairé,
une chambre claire (camera lucida) constituée d'un miroir et d'une
lentille, au sol un plan relief
de la portion de territoire que représente la toile et enfin l'image
du paysage projetée sur le
relief par la chambre claire. Les spectateurs pourront constater qu'image
et relief, quoique
"fidèles" I'un et l'autre, ne sont pas compatibles. Mais
avoir tenté de les marier donne à penser.
C.F.
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